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Canaille le Rouge, son c@rnet, ses p@ges.

Espace d'échanges, de rêves, de colères et de luttes. Alternative et horizon communiste. point de vue de classe.   Quand tout s'effondre, ce n'est pas aux causes des ruines de gérer le pays mais à ceux qui sont restés debout.

Un grand Monsieur nous quitte,

Publié le 27 Mars 2015 par Canaille Lerouge in mémoire, Histoire, citoyen, Humanité, politique, engagement

 

"Je bloguerais les mots

s'il fallait les bloguer

pour que chacun sache

de quelle trempe il était"

 

un Communiste, un Combattant, un Camarade.

Un grand Monsieur nous quitte,

Les hasards de la vie militante et associative ont fait que Canaille le Rouge a cotoyé Jacques Damiani. L'homme avait une modestie aussi grande qu'était dense sa vie et grands les engagements qui donnaient sens celle-ci : témoigner, lutter, vouloir changer la société, construire un autre monde de Pain de Liberté et de Paix,  avec ce sourire appuyant un pétillement du regard qui portait sa confiance dans l'humanité.

De la résistance à l'internement à Eysse, la mutinerie des politiques, la répression en France puis la déportation, ses engagement sa fidélité à ceux-ci. Un lutteur.

Jacques Damiani. (DR.)

Jacques Damiani. (DR.)

Il a longtemps été président de l’ancienne association des déportés du Val-de-Marne et préparait encore la semaine dernière, les cérémonies des 70 ans de la libération des camps.

Le Fontenaysien Jacques Damiani est décédé samedi à l’âge de 90 ans. Un hommage lui sera rendu lundi 30 mars 2015, à 14 h 30, au cimetière de Fontenay, au 116, boulevard Gallieni.

La foule devrait être nombreuse pour se souvenir de ce résistant, militantcommuniste de longue date, qui avait été déporté à Dachau, Allach et Hersbrück.
 

Entré en résistance à l’âge de 15 ans, fin 1940, il aura vécu pendant la guerre des séjours dans différentes prisons du pays, avant d’être déporté dans le train de la mort en juillet 1944. « Toute sa vie il a fait des cauchemars de ce qu’il a vécu dans les camps, raconte son fils Loïc Damiani-Aboulkheir, adjoint au maire PCF de Fontenay à la ville numérique, au patrimoine historique et au cimetière. Il s’en est sorti grâce au militantisme. Il avait rencontré des communistes en prison pendant la guerre et n’a cessé de militer depuis. »

Jacques Damiani, arrivé à Fontenay en 1963, avait fondé l’union locale de la CGT de la ville en 68. Il avait longtemps secondé Louis Bayeurte, l’ancien maire de la ville, dont il était devenu le secrétaire politique. Les hommages affluent même d’Amérique du sud puisque l’ancien déporté avait parrainé des réfugiés politiques à leur arrivée à la Mission de France à Fontenay.

Laure Parny

Plutôt que des éloges, exercice pour lequel la Canaille est peu rompu, ces deux témoignages feront voir qui est l'Homme, avec cette immense majuscule :

Oui, paraphrasons Ferrat pour l'occasion : "je bloguerais les mot s'il fallait les bloguer pour que chacun sache de quelle trempe il était ".

Le lien où avec simplicité il explique comment à 16 ans, l'enchainement des faits conduit à être ce que l'on veut être dès lors qu'on veut rester maître de ses choix et ne pas subir :

http://bteysses.free.fr/Temoignages/Jacques_Damiani.htm

Une page à lire et faire lire plus que jamais.

 

Façon d'être fidèle à sa mémoire, pour continuer de porter son témoignage (extraits sur le convoi vers Dachau. Ce transport est le cinquième parti de France à prendre la direction du KL Dachau depuis le débarquement de Normandie. C'est aussi le plus important qui ait jamais quitté Compiègne.)

le lien pour la totalité du texte :

 http://lesamisdefontenay.overblog.com/2014/06/2-juillet-1944-un-survivant-du-train-de-la-mort-raconte.html

Nous étions entrés au camp de Royallieu à Compiègne venant du quartier cellulaire de la centrale d’Eysses à Villeneuve-sur-Lot via la prison de Blois. Sur les 60 détenus pris comme otages après notre révolte armée du 19 février 1944, nous ne restions que 48, nos 12 blessés ayant été fusillés. Les 1100 autres camarades de la centrale d’Eysses avaient déjà été déportés par le convoi précédent le 18 juin.

...Ainsi nous nous sommes retrouvés une petite vingtaine de résistants d’Eysses ensemble devant le wagon de marchandises sous une légère bruine. Les autres copains, une trentaine sont aussi regroupés dans un wagon… dont la capacité est « 40 hommes, huit chevaux en long »… A coup de crosses nous sommes entassés à plus de 100 dans cet espace d’à peine 21 m² ! La porte refermée avec force vocifération des gardes, c’est une sensation d’étouffement qui nous étreint car c’est une journée chaude qui se prépare, comme les précédentes. Il est à peine 7 heures du matin...

Nous les « Eyssois » tous résistants déjà bien aguerris qui avons connu de nombreux combats, des prisons et la répression, nous nous sommes regroupés dans un coin. Tout de suite nous décidons que, dès que le train roulera, nous essaierons de déclouer les morceaux de planches qui obturent les deux lucarnes du wagon afin d’avoir un peu d’air. Déjà des chicanes, des altercations, des cris s’élèvent de cet amoncellement de corps enchevêtrés. Il faut réagir avant qu’une bagarre n’éclate. Bref colloque entre nous et l’un de nos camarades prend la parole : « Notre voyage risque de durer, il faut économiser l’oxygène surtout à l’arrêt. Voici ce que nous allons faire : la moitié du wagon se tiendra debout, pendant que l’autre s’assiéra en tailleur, emboités les uns dans les autres pendant que trois d’entre nous agiterons des serviettes pour renouveler l’air »...

Mais quelques faits émergent de ces lancinants souvenirs.
D’abord l’odeur qui, dès le premier jour vers Reims, envahit le wagon, venant de celui qui le précède. Odeur douceâtre, écœurante, une odeur de mort, de pourriture, de plus en plus forte. Nous saurons à l’arrivée que, dans ce wagon métallique, il n’y a qu’un survivant au milieu d’une centaine de cadavres en putréfaction depuis des jours…
Je me souviens qu’à un moment, nous étions encore en France, j’ai pu griffonner un mot sur un morceau d’emballage qu’un camarade m’a fourni avec un petit bout de crayon. J’ai jeté le mot par la lucarne, comme une bouteille à la mer. Ce qui est formidable, c’est qu’une garde barrière, Mme Bonnet, mère de 5 enfants, l’a trouvé et l’a fait parvenir rapidement avec une belle lettre à mes parents.

Voila. Vous comprennez pourquoi Canaille le Rouge tenait à rendre ici et à sa façon hommage à Jacques Damiani.

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