Quand la presse
fait (bien)
son
boulot
En général, les cheminots sont très septiques sur les papiers concernant leur activité produits dans la presse, même quand les journalistes n'ont pas de prévention particulière contre la profession.
La caractéristique première des Rouletabille -pas blâmble en soit- étant de marquer leur papier de leur patte au risque parfois d'erreur décrédibilisant leur propos.
Quand ce n'est pas le cas, raison de plus pour le dire. Ce papier fait partie de ce qu'ailleurs on appellerait une perle rare, un merle blanc, en politique un socialiste socialiste.
Si le cœur du papier est intéressant et bien développé, Canaille le Rouge attire votre attention sur l'avant-dernier paragraphe. En six lignes, tout est dit. Elles renvoient aux motivations des luttes dans la profession depuis des années et singulièrement durant ces dernières semaines.
Autant vous en faire profiter.
“ La dépêche ” du 24 07
Alors que les rames accidentées ont été dégagées des voies, le trafic aurait dû redevenir normal. Il n'en est rien, beaucoup de conducteurs de trains ont fait valoir leur droit de retrait, estimant que la sécurité est engagée.
Si le bilan humain de l'accident qui s'est produit vendredi dernier entre un TGV et un TER, à Denguin, non loin d'Orthez, est finalement assez faible, ce dont on ne se plaindra évidemment pas, les conséquences sur le trafic ferroviaire dans la région sont, elles, énormes. En effet, si théoriquement le trafic pouvait reprendre normalement ou presque (avec des vitesses limitées dans le secteur de l'accident, ce qui entraînait un petit allongement de la durée des trajets), les conducteurs de train estiment que le compte n'y est pas en matière de sécurité. «À l'heure actuelle, il semblerait que l'hypothèse d'une erreur humaine soit écartée, en tout cas le conducteur n'a commis aucune faute, le problème serait donc technique, un dysfonctionnement du système de signalisation», détaille Christophe Hourcade (CGT cheminots), qui poursuit : «Dans un premier temps, les conducteurs de la région Aquitaine ont fait valoir leur droit d'alerte, suivis par les collègues de Midi-Pyrénées, une procédure collective qui nous permet d'attirer l'attention de l'entreprise sur un problème lié à la sécurité». Une procédure qui déclenche automatiquement une réunion extraordinaire d'un Comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), au cours duquel la question a été évoquée. «Mais nous n'avons pas vraiment eu de réponse ; aussi, une majorité d'entre nous, 24 sur 34 devant travailler, ont fait valoir leur droit de retrait», explique Gilles Teixier, un conducteur. «C'était prévisible, depuis 48 heures, je sentais que pas mal de mes collègues étaient stressés. Il faut nous comprendre, quand on est sur la voie et que le feu est vert, pour nous, ça veut dire que la voie est libre. Or, là, elle ne l'était pas et personne ne peut garantir qu'elle le sera. On pense à notre sécurité ainsi qu'à celle des passagers que nous transportons. On a échappé au drame l'autre jour, mais si ça se reproduit...»
Cela dit, les conducteurs n'ont pas posé un ultimatum, ils ont demandé, puisque la signalisation automatique pourrait être défaillante, à ce que soit mis en place le système ancien, à savoir le cantonnement téléphonique de gare à gare. «ça peut paraître archaïque, mais ça marche, les conducteurs sont prévenus par les gares que les trains attendus sont bien passés. Mais l'entreprise a refusé, on ne comprend pas pourquoi.» Certains évoquent un manque de personnel, et surtout la perte d'un savoir-faire, qui est essentiel si on veut que le système garantisse une sécurité optimale.
Résultat, le trafic, qui devait retrouver peu à peu la normale, reste très perturbé entre Toulouse et Hendaye, mais aussi Tarbes-Paris. Avec pas ou peu de trains, TGV ou TER, des bus de remplacement et des horaires plus qu'aléatoires, qui évoluent d'heure en heure...
Christian Vignes