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Canaille le Rouge, son c@rnet, ses p@ges.

Espace d'échanges, de rêves, de colères et de luttes. Alternative et horizon communiste. point de vue de classe.   Quand tout s'effondre, ce n'est pas aux causes des ruines de gérer le pays mais à ceux qui sont restés debout.

Quand René Andrieu tient la dragée haute à l'élyséen petit Marquis

Publié le 16 Janvier 2020 par Canaille le Rouge in politique, Mémoire et Histoire, histoire sociale, presse, lutte de classe, Capital, grèves, social, sociétal, crise, régime

L'édito de l'Humanité

du 21 mai 1968

 

 

GULLIVER DEBOUT

Quand René Andrieu tient la dragée haute à l'élyséen petit Marquis

Le petit Marquis du Touquet Paris Plage a cru bon d'étaler la culture de ses porte-plumes en citant René Andrieu pour éclairer ses Propos.

C'est vrai que l'intellectuel stendhalien les laisse toujours désarmés tant ce maitre d'escrime des idées, mais lui, de plein pieds dans les combat de son temps, après avoir reposé sa mitraillette de FTP, usait de sa plume pour combattre les géniteurs de cette générations de spadassins porte-LDB, protecteurs de l'aristocratie des coffre-forts et de la spéculation que nous avons toujours en face de nous.

Décidément, après Maurice Thorez convoqué par les successeurs des 200 familles pour faire cesser une grève qui restera dans l'histoire à la même importance que celles de 36, voici maintenant le rédac chef de l'Huma en 68 victime d'une même tentative de travestissement récupérateur ; hommage du vice à la vertu.

Plutôt que de crier au vol, au viol et au détounement de mémoire, Canaille le Rouge vous offre la réponse si bien ciselée et si bien anticipée que le 21 mai 1968 Renée Andrieu, à la une de l'Huma, alors organe central d'un parti qui proposait l'abolition du capitalisme et la suppression du salariat, adressait aux Macron de l'époque et d'après.

 

GULLIVER DEBOUT

 

 

Certains affirmaient volontiers que satisfaite de son sort ou tout au moins résignée, la classe ouvrière dormait.

Il faut croire que ce n’était que d’un œil.

Voici que se dresse le Gulliver ouvrier pour la plus grande confusion des divers Lilliputiens qui croyaient l’avoir définitivement ligoté.

Dans tout le pays, par millions, les travailleurs se sont mis en grève pour célébrer à leur manière le dixième anniversaire du gaullisme.

Ce qui frappe dans ce mouvement c’est la puissance, bien sûr, mais aussi son extraordinaire sang-froid.

Nous ne sommes plus au temps où les Canuts brisaient les machines qu’ils rendaient responsables de leur misère.

Depuis lors la classe ouvrière a grandi, elle s’est organisée, elle a trouvé dans ses propres rangs des dirigeants en qui elle a confiance, elle sait où elle va et elle sait ce qu’elle veut. Elle repousse les provocations et l’aventure mais elle avance avec une force tranquille vers des objectifs précis. En même temps qu’elle exige la satisfaction de ses revendications immédiates, elle veut un changement de politique, l’instauration d’un régime où l’homme soit enfin à sa vraie place.

Depuis que la classe ouvrière s’est ébranlée, le mouvement a pris une autre dimension. Le drapeau rouge sur la Sorbonne, c’était le signe qu’un vent nouveau soufflait sur la vénérable université bourgeoise. Mais le drapeau rouge sur les grandes usines, cela prend une autre signification. Les féodalités qui détiennent les richesses de la France sont cette fois frappées au cœur, ou à la caisse, ce qui en l’occurrence revient au même.

Non pas qu’il faille sous-estimer la portée de la révolte des étudiants. Non seulement parce qu’elle atteste la faillite du pouvoir dans le domaine décisif de l’Education Nationale. Non seulement parce quelle a créé un terrains propice à la relance des luttes ouvrières. Mais parce qu’elle débouche, pour employer un mot à la mode, sur la contestation du monde tel qu’il est. C’est là l’élément nouveau, cette prise des consciences de l’injustice de l’ordre social par l’ensemble des étudiants qui affirment leur solidarité avec la classe ouvrière et leurs sentiments internationalistes.

Sans doute cette démarche n’est-elle pas exempte de confusion. Il n’en reste pas moins qu’au-delà des extravagances de quelques-uns le mouvement des étudiants mérite d’être considéré avec sérieux et sympathie… Il comporte des traits spécifiques et représente une expérience nouvelle, enrichissante pour tous.

Cependant c’est la classe ouvrière qui, du fait de son nombre et de sa position dans la production reste la force décisive, révolutionnaire jusqu’au bout, adversaire irréconciliable du régime capitaliste. C’est parmi les étudiants que se recrutent les cadres de l’Etat. Le temps passé de la révolte généreuse ou anarchique, un certain nombre d’entre eux ne manqueront pas de s’intégrer au système (si celui-ci dure). Par contre, c’est un sort que l’ouvrier ne risque guère de connaître.

Certains technocrates avaient calculé l’avenir de la France et du Marché Commun avec la précision d’une machine IBM. Rien n’avait échappé à leur sagacité. Rien sauf qu’il existe des hommes, que ce sont eux qui créent les richesses et qu’il leur arrive de demander des comptes.

 

L'Humanité, 21 mai 1968.

Cet écrit de 1968 porte aussi en creux ce que les coups portées au mouvement populaire, les trahisons, et abandons nous ont imposé comme recul. Ce qu'il nous faut reconstruire dans les conditions de 2020 comme repères et objectifs, dont l'abolition du capitalisme et la suppression du salariat.

En gardant en tête de conserver ce qui fut efficace : l'union, de rejetter ce qui fit désastre, celle des sigles et non des contenus ainsi que le contrôle par les producteurs eux même des conditions politiques de leur émancipation sans déléguer à d'autres la définition des contenus et les solutions pour leur mise en oeuvre.

Pour Canaille le Rouge, c'est la seule façon de rester fidèle à l'esprit de 68, de celui qui l'analysait si bien dans son journal d'alors.

Le reste n'est que soit de la poudre aux yeux ou l'aveu du refus de combattre pour un autre ordre économique et social.

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