Le peuple grec répond "non" à la mise en tutelle européenne
Gréves et manifetations en
Grèce
Le NON des Grecs
The Associated Press
ATHENES - Les aéroports sont restés fermés et de nombreux services publics ont été
suspendus ou réduits au service minimum mercredi en Grèce.
Les syndicats de fonctionnaires ont déclenché une grève de 24 heures pour protester contre les mesures d'austérité du gouvernement, destinées à réduire l'écrasante dette publique du pays, qui sera aussi au coeur du sommet européen de Bruxelles, jeudi.
Les chauffeurs de taxi d'Athènes comptent de leur côté débrayer jeudi, et le secteur privé le 24 février.
Les écoles, hôpitaux, perceptions des impôts et représentations ministérielles en région étaient en grève mercredi, de même que plusieurs milliers de contrôleurs aériens, douaniers, médecins hospitaliers et enseignants.
Le trafic des trains était fortement perturbé sur les lignes nationales, mais les transports en commun circulaient normalement.
Dès le début de la matinée, des centaines de retraités et de grévistes se sont rassemblés place Syntagma, dans le centre d'Athènes, en attendant le départ des manifestations.
"Aujourd'hui, les travailleurs ont répondu au gouvernement", scandaient les haut-parleurs. "C'est une guerre contre les travailleurs. Nous répondrons par la guerre, jusqu'à ce que la politique ait changé de voie", a expliqué Christos Katsiotis, membre d'un syndicat ouvrier affilié au Parti communiste.
Le Front de lutte syndical (PAME), émanation du Parti communiste (KKE ), avait appelé ses membres à se joindre au mouvement, réunissant environ 5.000 militants lors d'un rassemblement séparé dans la capitale grecque.
«La ploutocratie doit payer pour la crise», indiquaient des banderoles portées par les manifestants communistes, qui criaient des slogans contre «les banquiers, les armateurs et les grandes sociétés».
Et les nouvelles mesures annoncées quelques heures auparavant n'allaient pas rassurer les manifestants: hausse de la taxe de l'Etat sur l'essence et obligation pour tous les commerces de délivrer
des factures afin de lutter contre la fraude fiscale.
Pour Alexandros Potamitis, 57 ans, retraité, "ce ne sont pas les employés qui ont pris tout l'argent, c'est la 'ploutocratie'. C'est donc à elle de le rendre."
Mais la participation a finalement été faible et la météo pluvieuse. Quelque 7000 personnes ont défilé, ce qui est peu par rapport à d'autres manifestations organisées par les mêmes syndicats et qui avaient alors mobilisé des dizaines de milliers de personnes.
A Thessalonique, deuxième ville du pays, 3000 personnes se sont aussi rassemblées.
Le plan d'austérité du gouvernement de centre-gauche (Parti socialiste, PASOK), qui a succédé aux conservateurs en octobre dernier, prévoit notamment un recul de deux ans de l'âge du départ à la
retraite, à 63 ans d'ici 2015, le gel des salaires des fonctionnaires, des coupes budgétaires, une diminution des dépenses publiques, la mise en place d'impôts supplémentaires et un renforcement
de la lutte contre l'évasion fiscale.
En 2009, le déficit de l'Etat grec a atteint 12,7 pour cent du produit intérieur brut (PIB), soit plus de quatre fois la limite autorisée par les critères de Maastricht. La dette publique a, elle, dépassé les 113 pour cent.
Le premier ministre Georges Papandréou, qui était reçu par le président Nicolas Sarkozy à Paris mercredi, a promis de "prendre toutes les mesures nécessaires (pour atteindre) (son) objectif de réduction du déficit de 4 pour cent en 2010, pour arriver à 8,7 pour cent du PIB". Il a ajouté que son pays avait "soumis un programme de stabilité et de croissance à la Commission (européenne)", et que celle-ci l'avait approuvé.
Les regards se tournent désormais vers Bruxelles, où les dirigeants de l'Union européenne étudieront jeudi les réponses à apporter à la crise grecque.
Les marchés financiers ont réagi positivement mercredi à ce qu'ils considèrent comme des indices d'une probable aide européenne à la Grèce. La rare participation du président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, à la réunion de jeudi ne leur a notamment pas échappé.
Certains analystes estiment que la BCE pourrait proposer une aide qui ne passe pas par un véritable plan de sauvetage, comme des garanties de prêt par exemple. Ou les grandes économies européennes, l'Allemagne et la France, pourraient apporter une aide. Des experts évoquent aussi des garanties de prêt ou une aide financière bilatérales.
La position de la première économie de la zone euro, l'Allemagne, sera déterminante. Berlin semble accepter de plus en plus que son intervention soit nécessaire pour éviter la contagion de la crise grecque à toute la zone euro.
Mais un soutien européen à la Grèce pourrait se révéler très problématique si d'autres pays en difficulté, comme l'Espagne, le Portugal ou l'Irlande, exigeaient le même traitement, met en garde Michael Hewson, analyste chez CMC .
Par Jean Lévy - Publié dans : Europe