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Canaille le Rouge, son c@rnet, ses p@ges.

Espace d'échanges, de rêves, de colères et de luttes. Alternative et horizon communiste. point de vue de classe.   Quand tout s'effondre, ce n'est pas aux causes des ruines de gérer le pays mais à ceux qui sont restés debout.

A propos du jugement condamnant Claude Guéant

Publié le 13 Novembre 2015 par Canaille Lerouge

on ne commente pas

une décision de justice...

A propos du jugement condamnant Claude Guéant

Acte 1 : Le palmipède du mercredi nous apprend qu'il y a quelques jours le tribunal d'avignon a condamné à trois mois de prison ferme (le ministère public en avait demandé 6) pour un SDF au RSA pour avoir détenu 3,4 (oui trois virgule quatre grammes) de shit.

La proc disant pour justifier la peine "c'est le RSA qui finance son shit et il n'a pas répondu à la convocation du tribunal".

Acte 2 : l'excellent article dans sa distanciation de la chroniqueuse judiciaire du Monde qui fait partie de celles et ceux qui sauvent l'honneur du titre du journal devenue de révérence voire de  déférence, au choix des rubriques. 

Pascale Robert Diard nous rend compte du jugement de Claude Guéant qui certes n'est pas SDF, ne vit pas au crochet de la société par le biais du RSA, qui dispose d'un domicile permettant de recevoir les convocations du tribunal et des moyens pour ne pas recourrir à un avocat commis d'office.

Voici son article :

Jugement Guéant : « Une atteinte aux valeurs de la démocratie républicaine »

"Dans son jugement rendu vendredi 13 novembre dans l'affaire des primes en liquide de la police, le tribunal a condamné l'ancien directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy au ministère de l'intérieur à la peine de deux ans d'emprisonnement avec sursis et 75 000 euros d'amende. Il a également prononcé contre lui une peine complémentaire de cinq ans d'interdiction d'exercice de toute fonction publique.

 

Dans ses motivations, le tribunal considère qu'"en demandant à Michel Gaudin,[alors directeur général de la police nationale] de lui remettre, pendant vingt et un mois, la somme totale de 210 000 euros, prélevée sur les Fonds d'enquête et de surveillance de la police (FES), Claude Guéant, pour des motivations personnelles, s'est enrichi au détriment de l'intérêt général et des missions qui doivent être assurées par les fonctionnaires de police des services actifs du ministère de l'intérieur", ce qui constitue le délit de complicité de détournement de fonds publics.

"En conservant pour lui-même, selon ses explications, la moitié de ces sommes qu'il savait provenir d'un détournement de fonds publics, non déclarées fiscalement, et en partageant l'autre moitié avec des membres du cabinet du ministre de l'intérieur, en l'espèce ses deux directeurs de cabinet adjoint successifs et son chef de cabinet, il a en outre commis l'infraction de recel" de ce délitindique le jugement.

 

"Claude Guéant n'est pas fonctionnaire de police"

En réponse aux arguments de défense de Claude Guéant, selon lesquels ces fonds avaient été en partie utilisés pour assurer des missions de police en rémunérant des informateurs – notamment lors de la traque d'Yvan Colonna – le tribunal indique que "le cabinet ministériel est un organisme restreint, formé de collaborateurs personnels choisis par le ministre, ayant pour mission de l'assister et de le conseiller dans la réalisation de l'ensemble de ses missions. Les autres justifications avancées, déjeuners avec des informateurs ou recherche active de certains terroristes par Claude Guéant lui-même, sont dépourvues de toute base textuelle ou de justification institutionnelle. Il n'est pas fonctionnaire de police, ni officier de police judiciaire, ni informateur, et dispose d'une enveloppe de remboursement de frais par le cabinet ministériel."

 

Claude Guéant, a donc, selon le tribunal, "dans une volonté assumée d'enrichissement de lui-même et de ses plus proches collaborateurs, volontairement transgressé les lois de la République et détourné des fonds publics, évalués à 210 000 euros. Ces faits commis au sommet de la hiérarchie du cabinet ministériel, par un éminent représentant du pouvoir exécutif dont les fonctions exigent une probité irréprochable, portent une atteinte d'une extrême gravité à l'ordre public dont le ministère de l'intérieur a précisément pour mission de faire assurer le respect. Ils constituent en outre une atteinte aux valeurs de la démocratie républicaine et à la transparence de la vie publique, participant de la défiance que les citoyens peuvent nourrir à l'égard de la politique, des institutions et de ceux qui les gouvernent."

 

Sur la peine, le tribunal observe que "la question de la peine, et du sens de cette peine, dans le cadre d'une décision de justice rendue au nom du peuple français, prend une portée singulière en matière de détournement de fonds publics commis par un des plus hauts personnages de l'Etat, directeur du cabinet du ministre de l'intérieur à l'époque des faits et ayant par la suite exercé d'éminentes fonctions politiques, notamment celle de ministre de l'intérieur". Il rappelle que la peine encourue est de dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende.

 

"Eu égard à la gravité exceptionnelle de l'atteinte portée à l'ordre public par les agissements de Claude Guéant, la question d'une éventuelle peine d'emprisonnement ferme ne semble pouvoir être éludée." Mais, ajoute le tribunal, "Claude Guéant, âgé de 70 ans, n'ayant jamais été condamné, est devenu avocat. Les faits, révélés en 2013, ont pris fin il y a plus de onze ans et le tribunal considère que, malgré l'exceptionnelle gravité de l'infraction, une peine d'emprisonnement ferme n'est pas nécessaire, n'étant pas au surplus de nature à réparer le trouble causé par l'infraction."

 

"Mépris assumé de la loi"

Sur les peines complémentaires, le jugement souligne qu'"il n'est pas apparu au fil du dossier et des audiences que Claude Guéant, s'il a toujours répondu avec courtoisie aux questions du tribunal, ait cherché à assumer une quelconque part de responsabilité et à rétablir une certaine transparence concernant les pratiques opaques qui lui sont reprochées".

Rappelant que, à l'audience, Claude Guéant avait affirmé n'avoir rien commis d'irrégulier et avait indiqué: "Je ne le referai pas, compte tenu des ennuis judiciaires",le tribunal en déduit que "plus de onze ans après les faits, ne regrettant que les ennuis judiciaires personnels qui en ont résulté, il considère encore cette pratique comme régulière et justifiée. Cette argumentation constitue effectivement, comme c'est son droit le plus strict, le socle de sa défense. Elle relève néanmoins d'une certaine indécence de la part d'un des plus hauts personnages de l'Etat qui, au mépris des lois votées, qu'il s'agisse de la réforme Jospin [sur la suppression des primes en espèces] ou de la loi de finances fixant les crédits alloués pour les indemnités de sujétion particulière (ISP) [pour les membres des cabinets ministériels], s'est accordé de façon discrétionnaire le double privilège de puiser sur des fonds publics des compléments de rémunération en espèces augmentant ses revenus mensuels de 10 000 à 15 000 euros, et de ne pas les déclarer à l'administration fiscale."

"Sa formation, son expérience de la haute fonction publique et ses qualités intellectuelles notoires, poursuit le jugement, ne permettent pas d'imaginer qu'il n'avait pas compris le texte ni l'esprit de la réforme dite "Jospin" du 5 décembre 2001 ou qu'il ait pu considérer que cette dernière ne s'appliquait pas aux frais d'enquête et de surveillance de la police, ou pas à sa personne. Il apparaît dès lors justifié, eu égard à ce mépris assumé de la loi et à cette résistance déterminée à la modernisation de la gestion publique, de prononcer à l'encontre de Claude Guéant à titre de peine complémentaire, une interdiction temporaire d'exercer une fonction publique pendant la durée maximum de cinq ans."

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