Nitrate d'ammonium
Depuis 1912, les morts se comptent par milliers sur le parcours de NH4NO3 connu sous le double nom d'ammonitrate et nitrate d'ammonium. Ouvriers, marins, techniciens, populations civiles soufflés, brulés, noyés, broyés, des dizaines de milliers de blessés.
A ceux qui s'étonnent qu'un produit si dangereux puisse être géré de façon si peu sécurisé tant les catastrophes qui y sont liés jalonnent l'histoire de l'industrie chimique moderne, il est rétorqué que si il est convenablement manipulé il n'est pas plus dangereux que du propane ou autre une molécule et que sa fabrication à faible coût justifie l'usage de ce procédé chimique pour apporter les amandements en nitrates pour l'agriculture. Il a été aussi un élément majeur pour la fabrication d'explosif militaire, il est courament cité dans l'articulation acide nitrique - nitrate d'amonium - trinitrotoluène (TNT).
Dans le cas de Beyrouth les autorités libanaises confirment que nous sommes devant une chaine de défaillances là aussi systémiques liées au fonctionnement d'un capital débridé.
La traçabilité de la cargaison chargée sur un navire poubelle abandonné par un armateur sous pavillon de complaisance, puis un stockage d'urgence pour éviter une catastrophe à bord dans des conditions dénoncées depuis plusieurs années par la douane libanaise ont conduit au drame de ce 4 aout. Tout démontre une fois de plus que le convenable ne fait pas partie des critères du commerce international totalement aux mains du capital.
Ci dessous la liste des catastrophes majeures qui ne reprend pas les évènements "domestques" tels que fermes, jardinerie hangard ruraux brulées ou (et) soufflées.
Explosions accidentelles ayant impliqué du nitrate d'ammonium
- 1.12 avril 1916, explosion de Faversham, Kent (Royaume-Uni)
- 1.24 octobre 1918, explosion de Morgan, New Jersey (États-Unis)
- 1.326 juillet 1921, explosion de Kriewald/Knurów, Silésie
- 1.421 septembre 1921, explosion d'Oppau, Rhénanie (Allemagne)
- 1.51er mars 1924, catastrophe des Nixon Nitration Works, New Jersey (États-Unis)
- 1.65 août 1940, explosion de Miramas (France)
- 1.75 juin 1940, bombardement de Rouen (France)
- 1.829 avril 1942, désastre de Tessenderlo (Belgique)
- 1.916 et 17 avril 1947, catastrophe de Texas City, Texas (États-Unis)
- 1.1028 juillet 1947, explosion de l'Ocean Liberty à Brest (France)
- 1.11 23 janvier 1953, explosion du cargo Tirrenia en mer Rouge
- 1.127 août 1959, explosion de Roseburg (États-Unis)
- 1.1330 août 1972, explosion de Taroom (Australie)
- 1.1429 novembre 1988, explosions de Kansas City (États-Unis)
- 1.1513 décembre 1994, explosion de l'usine de Port Neal, à 25 km au sud de Sioux-city, Iowa, États-Unis
- 1.1621 septembre 2001 explosion de l'usine AZF de Toulouse (France)
- 1.172 octobre 2003, explosion de Saint-Romain-en-Jarez (France)
- 1.189 mars 2004, explosion de Barracas (Espagne)
- 1.1922 avril 2004, catastrophe de Ryongchon (Corée du Nord)
- 1.2024 mai 2004, explosion de Mihăileşti (Roumanie)
- 1.2110 septembre 2007, explosion de Monclova (Mexique)
- 1.2217 avril 2013, explosion de la West Fertilizer Company (États-Unis)
- 1.2312 août 2015, explosion au port de Tianjin (Chine)
- 1.244 août 2020, explosions au port de Beyrouth (Liban)
Le produit a un rapport coût de production/efficacité qui pour l'industrie chimique justifie que sa fabrication soit poursuivis sans rechercher de substitut plus stable. En plus ce ne sont jamais les administrateurs et actionnaires qui y laissent leur peau.
Exigeant un stockage garantissant une inertie totale, la quasi totalité des castrophes est liées à la présence d'un corps étranger qui le destabilise (fioul, impuretés métaliques ou végétales le plus souvent) qui le transforme en explosif. Jules Verne déja l'envisageait comme combustible pour sa fusée dans "de la terre à la lune".
L'argument du faible coût pour l'industrie chimique et son haut taux de rentabilité pour ses actionnaires tant il est demandé à travers le monde est-il une justification suffisante ? Le Capital pour sécuriser certaines de ses productions industrielles est capable d'engager des recherches lourdes pour substituer un produit A à risque par un B plus sûr dès lors qu'il y trouve son interêt.
Et si justement là était le problème ?
Il est pourtant plus complexe et plus couteux de chercher à remplacer les système de climatisation des sièges sociaux pour éviter des infections de types légionelose que de chercher des solutions stables pour l'apport des nitrates dont l'agriculture peut avoir besoin. Les capitaux engagés pour améliorer les clim est sans commune mesure avec l'inertie perpetuant les conditions de production et d'usage des ammonitrattes. Pour la partie engrais, notons qu'à l'autre bout de la chaine agricole on ne sait que faire de ces mêmes nitrates et on retrouve un problème similaire avec les éffluents animaux et la polution galopante des terres et rivières qui y est liée.
Le gouvernement libanais vient d'assigner à résidence toutes les personnes liées à la chaîne terrestre qui a conduit à la catastrophe. L'armateur véreux lui ne semble pas devoir être inquiété.