Dans une discussion fraternelle mais ferme, une relation de La Canaille devant les arguments de poids avancés pour aider à comprendre la position du KKE a eu cet argument définitif "qu'est-ce que ce parti communiste qui refuse l'alliance face aux nazis ?", reprenant implicitement l'argument propulsé par les réactions, devant la montée d'Hitler, à la face du DKP allemand et ses militants (massacrés grâce à Noske et l'alliance des corps francs fascistes et des sociaux démocrates). Clôturant le débat sans attendre la réponse, il tourna les talons et claqua la porte.
Comme je le sais plus impulsif que rancunier et qu'il lit assez souvent ces p@ges, La Canaille va tenter non pas de prendre la défense du KKE (il est assez grand pour cela) mais répondre à l'argumentation de ce bon pote qui lit les évènements avec un prisme déformé par trente ans de renoncement et défaite idéologique.
D'abord pour noter que la monté de l'extrême droite nazie en Grèce (dans un pays ou la collaboration comme en France à la même époque avait des émules de type milicien) n'est pas le fait des communistes mais historiquement de ceux qui les financent, les arment et s'en servent comme arme de division massive, de violence pour détourner le peuple des vrais causes de la crise.
Ensuite pour noter que la menace, devenue réalité en Grèce, l'ennemi principal, ce ne sont pas les nazis ailes droites supplétives de l'armée des marchés financiers et du capital grec mais bien ces marchés financiers et l'union sacrée des partis qui veulent imposer de force au peuple le joug du FMI et de la BCE. Les déclarations de Lagarde et de Merkel étant là si besoin pour apporter un éclairage supplémentaire.
Oui, d'accord mais pourquoi pas d'alliance du KKE avec la section hellénique de l'internationale bruxelloise appelée PGE (SYRIZA)? (Notez comment Mélenchon parle de la branche grècque du FDG comme s'il avait définitivement phagocyté les groupes et élus parlementaires de ce qui devient l'ex PCF. De ses virées dans le pays La Canaille n'a pas l'impression que cela fasse l'unanimité).
Pour deux raisons : la grande masse des associations syndicales et professionnelles de Grèce sont en lutte contre les purges dues aux décisions de la Troïka. Organisation ouvrière PAME, Front Antimonopoliste Grecque des indépendants et petits commerçants (PASEVE) (qui regroupe des milliers de travailleurs indépendants), les petits agriculteurs pauvres (par le biais des associations d’agriculteurs et de leurs comités de Paysans PASY) en lutte contre la politique agricole commune de l’UE. La Fédération des Femmes de la Grèce (OGE) et du Front Militant des Étudiants (MAS).
Cela rappelle le temps où en France un parti, le PCF était fort de son lien avec comme il le disait alors les masses et leurs organisations. Ce PCF au prix d'efforts persistants considérables a réussi à se couper de ce vivier et ne vit que dans une nébuleuse politicienne d'appareil ; chose que le KKE refuse. Faut-il l'en blâmer ou regarder comment il fait pour avoir ce lien qui assure sa capacité d'initiative politique ?
Autre point singulier, c'est le lien si ce n'est organique du moins quasi permanent pour les p'tit du PGE GUE (SYRIZA) de privilégier sur le terrain les accords avec le PASOK compromis comme seul sait l'être en France l'ex maire socialiste d'Henin Beaumont ou les dirigeants du PS des Bouches du Rhône.
Deuxième raison : Si le KKE se bat contre l'UE avec des positions (qu'il a conservé) identiques à celles du PCF d'alors, le groupuscule SYRIZA a voté pour Maastricht est d'accord avec l'UE ne s'oppose pas à l'Otan (dont l'histoire en Grèce rime avec mise en place et soutien à la dictature).
Il est demandé aux communistes grecs de faire l'union sacrée à "gauche" avec ceux qui veulent maintenir leur pays dans le cadre de ce qui créé la crise et la dépendance. Or dans toutes les élections depuis des mois SYRIZA fait alliance avec le PASOK pour tailler en pièce le KKE et aide à la division syndicale dans les entreprises et l'université. Le PASOK fait alliance depuis des mois avec la droite en Grèce.
Donc, le KKE est sommé de participer à une union de la " Gauche" avec des forces qui de plus ont non seulement approuvé les interventions impérialistes dans le monde mais en plus accepté que la Grèce serve de base arrière à ces opérations.
Bref, vu l'âge de mon interlocuteur évoqué plus haut, il comprendra que c'est comme si en 1947 on avait demandé à B. Frachon et M. Thorez de faire l'union sacrée avec la SFIO pour …organiser la CED et la CECA dans le pays et au passage en propulsant Force Ouvrière. L'Allemagne l'Otan et la CIA suffisait (déjà !).
Si l'ennemi c'est la CECA et la CED de 2012 à la sauce grecque c'est bien que le péril immédiat n'est pas la montée des nazis athéniens mais que pour éradiquer les seconds le mieux de battre les premiers.
Mais cette argumentation là, pour des raisons de sabordage de l'idée d'alternative au capital, vous ne la lirez pas dans l'Humanité, elle ne fera pas l'objet de débat dans le camp dit progressiste.
Il est vrai que cela mettrait à nu le comportement de la direction du PCF et pourrait donner des idées à notre peuple sur les objectifs de souveraineté populaire garante de la souveraineté nationale dont le PGE ne veut pas entendre parler.
La grèce et son peuple sont victimes d'une nouvelle agression. Depuis quelques dizaines de siècles ils y font face et réussissent dans la tourmente à inventer la démocratie.
Cela mérite solidarité.